lundi 29 août 2011

Le prix de l'autonomie

Il y a quelques temps j'ai été à la grande galerie de l’évolution avec mes deux enfants. Magnifique sortie mais, oh combien épuisante. Mon deuxième enfant a commencé à marcher depuis quelques mois et je découvre le prix de sa liberté. Il faut me rendre à l’évidence, quelque soit le contexte, quelque soit la situation, quelque soit l’époque, toute liberté a un coût et aujourd'hui j'en fait les frais. L’endroit est clos mais malgré cela la vigilance dont j’ai dû faire preuve est épuisante. Il vous faut sans cesse trouver un point de vue vous permettant d’avoir vos deux enfants dans votre champ de vision. Le moindre poteau, le moindre obstacle, le moindre groupe de touristes vous bloquant l’accès visuel à vos enfants et voilà votre rythme cardiaque qui s’accélère et la sueur qui commence à perler sur votre front. Je donnerais cher pour disposer d'un petit scanner portatif. Las, vous naviguez de Charybde en Scylla. Aucun répit. Même lorsque vous finissez par céder et à en porter un dans vos bras. Vous réalisez alors avoir troqué le répit de l’esprit contre celui du corps, et à la fatigue mentale se substitue une fatigue physique toute aussi pernicieuse. Votre bien être est entamé de tous les côtés et seul un entraînement régulier vous permet de supporter ces excursions.

Paradoxalement le moment le plus harassant a été le déjeuner. Je l’attendais comme la délivrance. La faim devait calmer, au moins de façon temporaire, l’appétit de découverte de mes enfants. Il n’en a rien été. J’ai dû mettre en place un protocole expérimental pour atteindre mon objectif, à savoir remplir suffisamment nos trois estomacs pour me garantir un retour salvateur dans le calme. Première étape : distraire mon aîné qui n’était manifestement pas encore tiraillé par la faim. Une paille dans son emballage aura suffi. Deuxième étape : calmer la sensation de faim du deuxième, qui le conduisait à pousser des grognements. On aurait pu les imaginer de circonstances en ce lieu de culte de l’Animal, mais dans cette grande galerie muette, ils étaient plutôt embarrassants. Je découvre rapidement et avec horreur que le lieu ne dispose pas de chaises bébés. La préparation doit alors faire place à l'improvisation. Sur les genoux, un bavoir autour du cou et je commence à le nourrir. Rapidement je comprends que sa satiété n’altérera pas sa revendication d'indépendance. Il veut manger seul et essaie de m'attraper le bras pour se saisir de la cuillère. Vous imaginez les conséquences. Il me faut recourir au triptyque infernal : Explication, Mise en garde et Punition. Là ma mémoire me joue des tours, mais il est assez possible que, par soucis d'efficacité, j'ai foncé directement à la punition. J'espère que les psychologues de la petite enfance me pardonneront. La troisième étape se passe sous les pleurs du plus jeune et consiste à nourrir l’aîné qui commence à entamer la paille en plastique pour calmer sa faim. Un petit pot, une grande cuillère et le tour est joué. Enfin presque. Je dois me résoudre à l'aider avec une deuxième cuillère pour accélérer le mouvement. Après deux compotes à boire qui m'auront valu quelques minutes de calme, je décide de rentrer, le ventre vide, mais l'esprit plein d'espoir quant au trajet du retour. Et effectivement, il se déroule dans un parfait silence, mes deux enfants ayant eu la bonne idée de s'endormir immédiatement. Après une demi-heure de trajet je décide de prolonger le plaisir. Je me gare en bord de route, je ferme les yeux et je les rejoins fuis vers de doux rêves où mes enfants ont gagné leur indépendance et moi retrouvé ma liberté.

On n'imagine pas le niveau d'énergie qu'il faut déployer pour s'occuper et occuper quotidiennement deux jeunes enfants. Ma fatigue professionnelle d'avant n'est en rien comparable à celle qui m'étreint tous les soirs. Il m'arrive, j'en conviens, de rêver retrouver, le calme et la sérénité du bureau.

samedi 20 août 2011

Mon graal

Je n’ai jamais effectué autant d’excursions que durant mon congé parental. J’ai du visiter tous le zoos, parcs et autres pièges à parents de la région parisienne. Je ne compte plus le nombre de cartes de fidélité et abonnements annuels auxquels j’ai pu souscrire progressivement. Il est amusant d'ailleurs de constater après quelques mois l'effet que le mot excursion peut avoir auprès de mes deux enfants. A la simple prononciation de ce mot leurs yeux pétillent, leurs pieds trépignent et ils se précipitent vers l'armoire à chaussures tout en vous implorant du regard de les suivre. 

J’ai essayé de comprendre les raisons pour lesquelles j’avais eu une telle appétence, que dis-je, une telle boulimie pour les excursions. Après tout, certaines activités effectuées à la maison sont tout aussi plaisantes et épanouissantes, sans considérer qu'elles sont bien plus pratiques. L’excursion est en fait la meilleure arme contre, ce que j’appelle, le phénomène du bébé-zapper. La capacité d’attention des bébés est connue pour être particulièrement faible. J’ai noté qu’elle était également fortement corrélée à la familiarité que peut avoir l’enfant avec la situation et l’environnement. Pour résumer, moins un nourrisson sera en terrain connu et plus vous aurez la paix. Sa capacité d’attention sera décuplée par sa méconnaissance des lieux et vous gagnerez un peu de permanence. A cela ajoutez le plaisir que vous prendrez de votre côté à découvrir un lieu nouveau et vous aurez les 2 principales raisons pour lesquelles j'ai développé une addiction forte à l’excursion.

La permanence a été pour moi une quête éperdue pendant mon congé parental et l’excursion aura été mon graal. Son seul ennemi est votre niveau d’énergie qui doit être à son maximum pour supporter la répétition des efforts. Mais cela fera l'objet d'un prochain billet.  

mardi 16 août 2011

La fulgurance de l'escargot

Le développement de l'enfant est un moment tout à fait particulier qui n’a rien de comparable avec tout ce que j'avais pu connaître par ailleurs. Un mode d’apprentissage aussi surprenant que déroutant. J'ai connu les théories de « Change Management » en entreprise je découvre à l’occasion de mon congé parental ce que l’on pourrait appeler une révolution au ralenti ou la "fulgurance de l’escargot". C'est finalement le paradoxe ultime du changement, qui consiste à voir se succéder des phases d’apprentissage sidérantes de rapidité avec un processus d’une lenteur extrême. Et tout cela sans que l'on comprenne réellement les mécanismes à l'oeuvre qui rendent tel geste naturel dès le premier essai et tel autre hors de portée de long mois durant. Il m’a fallu pas loin de deux mois pour faire comprendre à mon aîné qu'après quatre il y avait cinq et pas neuf. Elle avait en effet décidé de passer de quatre à neuf puis dix et d’oublier tous les chiffres intermédiaires. S'agissait-il d'un pragmatisme à tout épreuve qui lui permettait de compter jusqu’à dix plus rapidement que tout le monde ? S'agissait-il d'un amour inconditionnel pour le 4 et le 9 qu’elle avait décidé de rapprocher pour l’éternité ? Je ne le sais pas mais je ne compte plus le nombre de fois où j’ai du la reprendre. A côté de cela nous avons été régulièrement bluffés par sa capacité à se souvenir de mots, de situations qu’elle n’avait vues ou vécues qu’une seule fois, ou bien à réaliser des gestes que nous lui montrions pour la première fois. 

Au delà de ce paradoxe plutôt amusant je retiens trois leçons qui m'ont marqué et dont il utile, y compris pour nous, adultes, de se souvenir dans la vie de tous les jours : 

1. Les enfants se construisent dans l'échec
Il faut en effet reconnaître que les moments de fulgurance sont bien moins nombreux que les moments d'échecs dans la vie de vos escargots. La formation est pavée de faillite. Certains gestes seront répétés des centaines de fois avant de se réaliser correctement. Votre rôle dès lors est d'accompagner cette démarche en tâchant de déceler la moindre fulgurance dans cette répétition chaotique pour encourager votre enfant. Vous félicitez tantôt les moyens (je suis fier de toi, tu ne te décourages pas ! C'est très très bien d'essayer encore et encore, tu vas finir par y arriver) et tantôt les résultats, même les plus imperceptibles (bravo c'est très très bien, tu as réussi à mettre un peu de purée dans ta cuillère. Le reste se réparti entre les cheveux, la table et le sol mais ce n'est pas grave !). Point de découragement. L'escargot a en effet trois qualités principales : il avance, il avance et il avance toujours. C'est une leçon pour chacun d'entre nous, cette résilience à l'échec se perd en effet très vite avec l'âge. 

2. Il est plus difficile de défaire que de faire
Une mauvaise habitude se prend rapidement mais met du temps à se défaire. Je me souviens de mon aîné qui avait appris à empoigner le crayon de couleur comme on empoigne un marteau. Impossible de lui faire entendre raison, il avait décidé que ses talents d'artiste se révélaient bien mieux de cette façon. Il m'aura fallu beaucoup de sueur pour qu'il change son habitude. Mon deuxième enfant, quant à lui, a développé très jeune des facultés de commando d'élite. Il était capable de se mouvoir, en rampant, en s'aidant d'une seule jambe, et en se propulsant à l'aide d'un seul bras plié devant lui, l'autre portant son doudou comme on porte un Famas. Là aussi une fois cette faculté acquise il lui aura fallu de long mois, pour ramper plus orthodoxement.  Au travers de ces exemples on se rend compte que l'apprentissage est précieux et qu'il faut prendre son temps. Evitez la précipitation et faites en sorte que les conditions soient optimales avant de vous lancer dans une activité nouvelle. Vous augmenterez vos chances de trouver le geste juste et diminuerez les risques du dés-apprentissage.     

3. Un bon exemple vaut mieux qu'un long discours
Les enfants sont de formidables spectateurs et les adultes, plutôt conteurs qu'acteurs. Je me suis surpris plusieurs fois à expliquer en détail un concept à mes enfants. Des mots, des mots, toujours des mots alors que la meilleure démo est celle silencieuse où vous réaliser une tâche et laissez votre enfant vous imiter.  

Il est également fascinant de côtoyer des êtres qui n'ont absolument aucune barrière mentale, aucune inhibition et agenda secret. Contrairement à ce que l'on a tous pu voir dans le monde de l'entreprise. L'apprentissage, même lent, reste d'une fluidité idéale et le changement tant redouté lorsqu'on est plus grand devient pour un enfant une quête quotidienne et une source d'épanouissement.

mercredi 10 août 2011

Indignez-vous - Chapitre 2


Voici ce que l'on trouve au rayon P'tite fille d'une célèbre enseigne soit disant agitateur d'idées. Je vais très certainement y trouver mon bonheur ! Sans commentaire.

mardi 9 août 2011

Avant j'avais des principes, aujourd'hui j'en ai d'autres

Nous connaissons tous l'adage "Avant j'avais des principes, aujourd'hui j'ai des enfants". Je dois bien admettre que cet adage comporte une grande part de vérité. Une grande part seulement, car celui qui me correspondrait mieux serait "Avant j'avais des principes, aujourd'hui j'en ai d'autres".

Comme certainement la plupart d'entre nous, j'ai commencé mon congé parental pétri, ou devrais-je dire, prisonnier de principes. Des principes de précautions (comme rester à une distance raisonnable de mes enfants lorsqu'ils jouent sur une aire de jeu), des principes éthiques (comme l'interdiction de la violence), des principes de réalité (comme l'acceptation de la violence dans une logique de défense de soi), des principes d'équivalence (comme la nécessité de consacrer un temps identique à mes deux enfants), des principes principaux (comme l'obligation d'être couché avant 21h) et des principes secondaires (comme le droit de se lever même après 21h pour soulager un besoin naturel), des principes de causalité (à chaque bêtise une punition), des principes de constance (la sieste dure à minima 1h30, la santé mentale du papa en dépend), des principes de double négation (si papa dit non, maman dit non aussi), des principes de moindre effort (on ne change une couche que lorsqu'elle est sur le point de déborder), des principes de subsidiarité (la nounou a les mêmes prérogatives que les parents), des principes d'inertie (lorsque papa fait quelque chose, il ne peut être interrompu, il faut le laisser finir), des principes de plaisir (une bonne action peut-être récompensée) et même le principe d’Archimède (la bouée dans une piscine y compris en présence d'adultes), toute ma vie parentale était devenue une question de principe !   

Une vie dogmatique et idéologique qui n'aura pas résisté longtemps à l'épreuve de la réalité. Vous mettez une vie à construire vos principes et quelques minutes suffisent à vos enfants pour les faire chanceler et voler en éclats. La réalité est un peu plus subtile. Vos principes ne disparaissent pas du jour au lendemain. Le principe est en effet la chose la plus malléable et protéiforme de mon congé parental. Attaqués et chahutés, ils conservent, contre vents et marées, cette formidable faculté à résister encore et toujours aux assauts de votre progéniture. Tel le roseau ils plient mais ne cèdent pas et telle la matière ils changent mais ne disparaissent pas. Même acculés, ils pourront, dans un formidable élan de survie, se transformer pour vous offrir un visage plus acceptable et adapté.

L'honneur est sauf ! Officiellement vous restez un homme ou une femme de principe, droit dans vos bottes ! Mais officieusement, et souvent sans le savoir, vous avez, en fait, troqué vos principes d'airain pour des principes protéiformes.

Je me souviens du principe suivant : mes enfants ne regarderont pas de dessin-animés à la télévision avant 6 ans. Il est amusant de noter que très vite je les ai pris avec moi pour leur montrer des images d'animaux sur internet. Le passage aux vidéos d'animaux fut relativement rapide. Il n'y avait ensuite qu'un pas à faire pour leur faire écouter quelques génériques de dessin-animés avec des animaux (Bouba, Calimero, Maya l'abeille, ....). Je dois me confesser, j'ai fais ce pas il y a quelques temps. Mais attention un générique n'est pas un dessin-animé et un ordinateur n'est pas la télévision. L'éveil musical est important pour les enfants et j'avais un principe : jamais plus de 10 minutes. Il y a quelques semaines, mon doigt a dérapé et j'ai malencontreusement cliqué sur le mauvais clip vidéo (youtube est vraiment mal conçu). J'ai ainsi montré à mon aîné, bien malgré moi, quelques minutes du premier épisode de Maya. L'effet fut immédiat, elle a adoré et moi j'ai pu me reposer un peu la voix. Gageons que nous poursuivrons l'expérimentation. Mais attention j'ai des principes : jamais plus de 15 minutes et toujours en présence des parents. Cela permet d'accompagner certains messages et cela évite une passivité trop importante.

Je sais ce que vous pensez : mon aîné n'a que trois ans, il me reste trois ans à tenir avant ses 6 ans et à ce rythme il risque de finir avec un écran greffé sur la cornée. En principe seulement ... 

samedi 6 août 2011

Le jour où j'ai gagné mes gallons de maman.

Voici deux scènes vécues dans les parcs parisiens la première au tout début de mon congé parental et la seconde il y a quelques temps. Vous noterez la progression stupéfiante du papa. La chrysalide, gauche et emprunté, que j'étais a finalement réussi à déployer ses ailes et à se fondre dans le paysage. Je suis désormais prêt pour le troisième enfant.

Le Parc version chrysalide
Je me souviens d'une de mes premières sorties au parc avec mes deux enfants.  Dans ce nouvel univers, mes gestent devaient certainement trahir mon manque d'entrainement. Mes enfants, eux, sympathisent immédiatement avec d'autres enfants et me voilà racontant mon aventure de père au foyer à une des mamans. Surprise et étonnement devant l'OMNI que je suis devenu (Objet Maternant Non Identifié) et soulagement lorsque j'explique que ma femme travaille une partie de son temps depuis notre domicile. "Ah je comprends mieux !" me répond-elle. "Je n'ai évidemment pas été lâché dans la nature comme cela. Vous pensez bien !" lui rétorquais-je sur un ton sarcastique.  

Le Parc version papillon
La scène se passe dans le bac à sable d'un parc. Mes petites filles y jouaient tranquillement, sous mon oeil protecteur. Je remarque immédiatement un enfant plus turbulent et plus violent que les autres. Effectivement au bout de quelques minutes je le vois attraper un tracteur en plastique, le soulever dans les airs et le projeter violemment sur le crane d'un autre garçon. Ouaaouhhh ! Quelle violence ! J'avais déjà remarqué que les bacs à sable étaient le reflet de notre société et qu'ils portaient en eux toute la palette des émotions et sentiments humains. J'ai connu les bousculades pour un jouet, les projections de sable, les grosses colères, j'ai même reçu une très légère claque par un enfant de 2 ans que j'essayais de résonner. Mais un tel déchaînement de  violence, à cet âge là, c'est relativement nouveau pour moi. Je me tourne vers la maman le regard implorant une intervention de sa part. Elle se tourne vers moi et m'explique alors qu'il est comme cela depuis quelques temps, qu'elle est désemparée face à ce comportement et que malheureusement à cet âge là il ne comprend pas ce qu'on lui dit. Ravi de partager ma courte expérience je lui réponds qu'au contraire il comprend tout. Je lui explique alors que nous avons également eu une période où notre aîné avait décidé de nous frapper lorsqu'il était en colère et que la solution était la fermeté devant ce type de comportement. Rassérénée, elle menace alors son enfant de rentrer à la maison s'il recommence. Ce qui évidemment ne manque pas d'arriver quelques instants plus tard. Elle l'attrape alors avec détermination, lui annonce qu'ils rentrent de ce pas. Voilà une réaction pleine de bon sens, me dis-je. Une menace proférée et mise à exécution. Une bonne crise qui ne sera pas gâchée. Je l'encourage le regard approbateur et surtout ravi qu'on ait vu enfin en moi un père tout aussi capable qu'une mère.

Ma joie sera de courte durée. Une dizaine de minutes plus tard je me retourne et je tombe sur cet enfant et sa maman en train de jouer ensemble sur un autre jeu. Mon sang ne fait qu'un tour. Je suis hors de moi. S'il y a une chose qu'un enfant doit comprendre c'est que les limites imposées par ses parents sont fixes et pas flexibles. J'ai beaucoup hésité à retourner voir la maman pour le lui dire mais je me suis finalement abstenu. Après tout chacun est libre d'avoir tort !

Ce jour là, au delà de mon agacement devant ce comportement, j'ai eu le sentiment d'avoir véritablement gagné mes gallons de maman. 

vendredi 5 août 2011

OMNI : Objet Maternant Non Identifié

Je me suis souvent posé la question de ce qui pouvait me différencier de toutes ces mères que je croise au quotidien dans les lieux branchés de l'ultra-jeunesse (ludothèque, espaces pour changer les bébés, manèges, bac-à-sable, boutiques spécialisées, ...). La finalité de notre existence est identique : offrir à nos enfants un environnement sécurisé et sécurisant lui permettant de se construire et de se développer en tant que personne. Les moyens que nous utilisons sont très similaires : un savant mélange de prévention et de répression tout en épiant la moindre disponibilité de cerveau permettant de proposer une séance d'apprentissage. Disponibilité d'autant plus courte que l'enfant est petit. Les outils pédagogiques sont également très proches. En dépit de tout cela, il subsiste quelques différences notables.

A quoi reconnaît-on donc un papa lâché dans la nature avec sa progéniture ? Après avoir dénoncé avec force certains clichés dans mon précédent billet, en voici d'autres plutôt savoureux, tirés de mes premières semaines à la maison (mais rassurez vous la courbe d'apprentissage est plutôt abrupte) : 

- Il oublie une fois sur deux le sac de change et improvise un changement de couche dans le parc avec une bouteille d'eau, quelques mouchoirs et une couche récupérée auprès d'une maman compatissante

- En revanche il n'oublie que très rarement le nécessaire pour changer une roue (pompe et chambre à air de rechange). C'est bien connu on change plus souvent les roues de la poussette que les enfants.

- C'est le seul homme qui a le privilège de fréquenter les toilettes pour femmes qui ont le bon goût d'héberger dans 90% des cas les tables à langer

- C'est le roi des fautes de goût en matière vestimentaire pour ses enfants : deux chaussettes dépareillées, un haut de pyjama pour sortir et un pantalon trop grand avec des revers qui montent jusqu'au genou.

- C'est le seul à pousser d'une main une poussette vide tout en portant de l'autre son enfant.

- C'est le seul qui ose sortir en roller avec une poussette double et affronter le regard horrifié de toutes les mères du quartier

- C'est le seul suffisamment inconscient pour tenter l'aventure du métro parisien avec 2 enfants de 3 et 2 ans et une poussette double

- Il invente des jeux stupides avec ses enfants qui agacent passablement la maman : "chéri, c'est encore toi qui lui a appris à jeter la serviette dans le bain ?" - "Euh oui ... mais c'était un jeu ... je devais l'attraper avant qu'elle ne touche l'eau !"

N'hésitez pas à continuer cette liste avec toutes vos anecdotes de papa. J'attends vos commentaires 

lundi 1 août 2011

La chute

On imagine souvent la chute comme un moment bref, précédé éventuellement de quelques instants de lucidité extrême qui nous fait voir la fin dans toute son orgueilleuse splendeur. Un moment qui serait le creuset d'un maelström gigantesque où se mélangeraient dans un vacarme assourdissant, une chaleur oppressante et des forces écrasantes. Les enfants vous poussent à revoir vos clichés. Ils donnent un nouveau visage à la perdition de soi. La brièveté du moment laisse la place à un cycle infernal. Lent. Très lent.

Nous avons vécu, mon épouse et moi, quelques moments particulièrement difficiles qui ont généralement toujours eu à peu près les mêmes caractéristiques. La dimension répétitive aurait dû être la promesse de clés permettant d'interrompre les cycles infernaux et pourtant nous n'avons rien trouvé, aucune solution miracle, si ce n'est s'accrocher au maigre espoir de temps meilleurs. Après la pluie, le beau temps paraît-il ? Vérité éclatante qui oublie bien souvent les inondations, les épidémies et autres désastres qui accompagnent le beau temps revenu et vous aident à patienter jusqu'au nouvel épisode pluvieux. Et c'est précisément de cela dont je vais vous parler.

Il n'y a rien qui ressemble plus à un enfant malade qu'un autre enfant malade. Aux symptômes habituels décrits sur tous les sites médicaux s'ajoute une liste complémentaire dont, pudiquement, personne ne parle. Caprices, colères, opposition, pleurs. Nos enfants se transforment en petits monstres dès la moindre fièvre. Tout se passe comme si la mobilisation de leurs défenses immunitaires laissait ressortir la noirceur de leur personnalité. C'est grave docteur ? Est-ce que les antibiotiques agissent également contre les caprices ? Faire tomber la fièvre, d'accord, mais je voudrais également faire tomber leurs colères, avez-vous quelque chose pour ça ? En réalité vous êtes bien démuni et évidemment compatissant. Ce qui n'arrange rien.

Tout commence par quelques caprices inhabituels et un nez qui coule. Cet état pathologique latent peut durer quelques jours et se poursuit généralement par une très légère fièvre. A ce stade votre capital santé est déjà bien entamé. Une fois la fièvre installée, la toux ne met jamais trop longtemps pour arriver. Le rendez-vous chez le médecin, espéré comme la délivrance ultime, ne marque en fait que le début de votre calvaire. Il vous faut, à minima, tenir au moins 72h de plus après le début d'un traitement éventuel. Et cela pour un enfant. Lorsque vous en avez deux, il se passe en effet un phénomène effrayant, qui consiste en ce que le dernier malade contamine le premier guéri. La première fois que cela vous arrive, rassurez-vous, généralement vous n'avez déjà plus la force de réfléchir.

Un enfant malade perd par ailleurs la faculté de se mouvoir par ses propres moyens. Le seul moyen de locomotion toléré est le fauteuil constitué par le creux de votre bras bien calé sur votre corps. Lorsque vous avez deux enfants malades vos deux bras sont sollicités et je vous déconseille évidemment d'en avoir trois si vous ne voulez pas risquer d'être à court de ressources. A la fatigue psychologique s'additionne donc une fatigue physique, voir quelques traumatismes tendineux. 10 et 15kg à bout de bras pendant une journée et c'est vous qui finissez sur les rotules. Pour ceux qui n'ont pas d'enfants, imaginez deux packs d'eau dans chaque bras qui bougent, pleurent et accessoirement fuient un peu et vous comprendrez la difficulté.

Un enfant malade ne dort plus. Là aussi, tout se passe comme si les défenses immunitaires, trop occupées à combattre le rhume, ne s'occupaient plus de chasser les cauchemars. "Papa j'ai rêvé d'un dragon " - "Mon chéri ne t'inquiète pas, avec la quantité de microbes que tu charries, aucun dragon n'osera s'approcher de toi !". Vous passez votre nuit au chevet de vos enfants pour adoucir leur sommeil et au petit matin, invariablement, quelque soit leur état de santé, c'est eux qui sont à votre chevet pour vous sortir du vôtre.

Un enfant malade ne mange plus et ne boit plus. Et pourtant vous n'êtes pas sans savoir l'importance de l'alimentation et de l'hydratation en période de convalescence. Les repas se transforment dès lors en guerre de tranchées. L'ensemble de l'arsenal est alors déployé : menaces,  promesses, ruses, jeux...  Tout y passe. Et cela vous demande une énergie considérable.

C'est promis, la prochaine fois je me mets en arrêt maladie.

dimanche 31 juillet 2011

Indignez-vous - Chapitre 1

Je suis frappé depuis maintenant de nombreux mois par la quantité invraisemblable de références "sexistes" qui entourent les très jeunes enfants. Ayant une fille et désireux de lui offrir les meilleures chances dans la vie, je m'étais promis d'essayer de lutter de toutes mes forces contre ces références pour lui proposer un environnement où les qualités et les valeurs n'étaient pas déterminées par le sexe de l'enfant. Mais voilà, je suis submergé au quotidien par les vagues à la fois insidieuses et flagrantes d'un océan de sexisme. Il est d'ailleurs possible que les références que je remarque ne constituent que la partie émergée de l'iceberg. Je ne compte plus les livres présentant une princesse sans défense, isolée dans son château dont la seule occupation est d'attendre son preux chevalier, bravant tous les dangers pour la secourir. Je ne compte plus les fables, comme celle que j'ai empruntée par mégarde à la bibliothèque récemment, et qui présente une souris que les parents essaient de marier (!). Étant la plus jolie des souris, elle ne peut évidemment se marier qu'avec le plus puissant des êtres. Ce conte populaire est loin d'être un cas isolé. Témoins d'autres époques, les contes populaires dépeignent un sexisme omniprésent et caricatural. Il est très surprenant qu'ils soient toujours aujourd'hui aussi présents et qu'ils n'aient pas été adaptés.     

Il s'agit là d'exemples terriblement flagrants, qui nous font tous sourire, et contre lesquels il est à priori facile de lutter. Mais le mal est bien plus profond et sournois. La pollution sexiste s'insinue partout. J'ai acheté récemment un jeu très connu consistant à associer deux pièces de puzzle ensemble représentant un métier. Évidemment l'infirmière était une femme et le médecin un homme. Les livres pour enfant sont truffés de représentations sexistes. Amusez-vous à les identifier; vous n'êtes pas au bout de vos surprises. Cela n'est d'ailleurs pas que l'apanage des ouvrages "classiques" qui ont traversé les âges, c'est également vrai dans des livres beaucoup plus récents. Au détour d'une page, vous trouverez par exemple une scénette présentant une famille au petit déjeuner, le papa s'en allant travailler et la maman s'occupant des enfants. Dans une ferme c'est évidemment un monsieur qui conduira le tracteur et une femme qui traira la vache. Sauf à ce que le système de traite soit électrique - auquel cas c'est bien sûr un homme qui officiera. Lorsqu'il s'agit de représenter quelqu'un qui éduque un chien, il aura évidemment les traits d'un homme et lorsqu'il faut montrer un adulte dans une cuisine, il aura la plupart du temps les traits d'une femme. De la même façon lorsqu'il faut représenter un cambriolage, le voleur sera un homme et la victime appelant les policiers sera une femme.

Une des objections qu'on pourrait facilement me faire est que ces exemples ne sont finalement que le reflet de notre société et de ses inégalités. Effectivement. Cela dit est-ce une raison suffisante pour les reproduire dans la quasi exhaustivité des livres et les asséner à nos enfants comme des vérités établies sans aucune forme de distance ni d'accompagnement ? D'autres réalités comme la mort et la prison sont présentées avec bien plus de précautions à nos enfants. Par ailleurs ces représentations, au delà d'associer un métier à un sexe, généralement véhiculent des symboles et c'est là où l'association peut-être choquante. Que le symbole de l'autorité (le maître du chien) ne soit présenté que sous des traits masculins est particulièrement choquant. Tout comme peut l'être le symbole de la faiblesse et de l'assistanat, représenté très souvent sous des traits féminins.

On pourrait également s'interroger du danger de l'association omniprésente rose-fille et bleu-garçon. Dans l'absolu on ne voit pas bien en quoi cela pourrait perturber le développement de nos enfants et pourtant. Après quelques mois passés dans cet environnement, je perçois aujourd'hui trois problèmes majeurs. D'abord cela participe à la création d'un fort clivage entre sexes qui accentue l'idée de valeurs et de qualités propres à chacun d'eux. Ensuite, en accréditant l'idée que les goûts des enfants seraient dépendants du sexe, cela ne les aide pas à apprendre à se déterminer par eux-même et à avoir leur propre avis. Enfin, et c'est surtout cela qui me dérange, cette association rose-fille se prolonge avec tout un univers autour de cette couleur porteur de ses propres valeurs caricaturales (faiblesse, passivité, ...). Autrement dit, si nous avions par ailleurs des médecins en blouse rose, des hommes ou des femmes d'affaires en costume rose, cela ne me poserait aucun problème, mais ce n'est évidemment pas le cas.

Je suis aujourd'hui intimement convaincu des méfaits de ces références, imprimées aussi tôt dans le cerveau de nos chères têtes blondes et je suis surpris qu'il n'y ait pas une mobilisation plus importante pour changer cela. Mais comment lutter contre ? Le combat à titre individuel est particulièrement difficile. Je l'ai compris le jour où j'ai demandé à ma fille quelle couleur elle préférait et qu'elle m'a répondu du tac au tac "le rose parce que je suis une fille".  J'avais pourtant le sentiment d'être sensibilisé et donc prudent. Mais il est difficile de lutter contre cette pollution sournoise.

Je rêve d'un label qui permettrait de garantir un traitement plus égalitaire des sexes dans les livres ou les jeux pour enfants. Ce même label pourrait également valider les méthodes pédagogiques. A défaut, il nous faut exercer une vigilance de tous les instants et être prêt à adapter certaines histoires et à boycotter certains jeux. Pour ma fille la jolie souris est devenue la souris la plus savante et le rose une couleur parmi d'autres qu'elle peut aimer non pas parce que c'est une fille mais pour ce que cette couleur lui évoque.

Et vous qu'en pensez-vous ?  

De retour

Après trois semaines de vacances (et oui même en congé parental on peut prendre des vacances !) me voici de retour avec de nouveaux billets :
  • Plus engagés
  • Plus drôles
  • Plus décalés
Préparez-vous à me lire

dimanche 10 juillet 2011

Comment les enfants réussissent là où les femmes échouent

Les enfants réussissent en quelques semaines là où de nombreuses femmes ont échoué de nombreuses années durant. Il y a, dans cette expérience Mesdames, de bonnes leçons à retenir. Quant à vous Messieurs, certes je trahis la cause mais sachez que cela se fait bien malgré moi. Prisonnier d'un monde ultra-féminisé, je développe petit à petit le syndrome de Stockholm et j'espère pouvoir compter sur votre indulgence.

Nous avons développé avec les années, nous les hommes, une faculté tout à fait remarquable nous permettant d'ignorer superbement les injonctions de notre entourage, essentiellement féminin, et de rester calfeutrer confortablement dans notre bulle personnelle. La démarche, quelques soit l'homme, est souvent très proche même si la recette peut contenir quelques variantes. Voilà comment, de mon côté, je m'y prends.

Lorsqu'on s'adresse à moi je relève la tête ostensiblement pour n'éveiller aucun soupçon. Un mouvement franc voir exagéré. Je pose mon regard sur le nez de mon prétendu interlocuteur. Il est important d'éviter les yeux, beaucoup trop accrocheurs, ainsi que la bouche car la tendance naturelle à vouloir lire sur les lèvres vous ferait immanquablement entrer dans le dialogue. Le nez se trouve être ainsi le parfait compromis. Ensuite il vous suffit de vous laisser porter par le rythme de la phrase. Oubliez les mots et n'écoutez que la douce mélodie. Cette dernière pourra accompagner au choix et placé par ordre croissant de difficulté quelques réflexions personnelles, la télévision, la consultation de pages web, la lecture d'un livre placé devant vous ou même avec un peu d'expérience l'envoi de SMS. A chaque baisse de rythme dans la phrase, inclinez la tête et prononcez un murmure approbateur "mmm" ... "mmm". La difficulté première réside dans le rictus qui accompagnera le murmure. Il doit être le plus neutre possible pour pouvoir être interprété par votre soi-disant interlocuteur de la façon qui l'arrange. A la manière d'un horoscope. Vous devez tendre vers le sourire et le regard de la Joconde. La deuxième difficulté réside dans la faculté à capter certains "buzz word", notamment ceux qui appellent une réponse ouverte ou fermée. Là, vous n'aurez pas le choix : il vous faudra sortir de votre activité et interagir brièvement avec votre pseudo-interlocuteur. La technique dès lors consiste à commencer une phrase par une réponse fermée. Utilisez évidemment plutôt un "oui" qui marque l'accord qu'un "non" qui marque l'opposition. Le oui devra être timide et du bout des lèvres en hochant lentement la tête de droite à gauche. Devant la réaction de votre interlocuteur vous pouvez soit prolonger les hochements de tête et le laisser poursuivre son monologue soit vous fendre d'une réponse ouverte passe-partout du type : "oui effectivement ... mais cela demande quand même réflexion". Le taux de réussite de cette technique est remarquable et vous garantira une paix royale.

Depuis le début de mon congé parental j'ai essayé de l'appliquer avec mes deux très jeunes enfants et je dois reconnaître que cela a été, à mon très grand regret, un échec patent. Tout d'abord les murmures déclenchent invariablement la même question : "Papa pourquoi tu fais ... mmm ... mmm". Ensuite le rythme des phrases, à la fois sauvage et chaotique chez les jeunes enfants, vous conduit systématiquement à placer vos réponses et vos murmures aux mauvais endroits. Résultat désastreux. Enfin lorsque la réponse n'est pas exactement celle attendue, vous devrez faire face à une riposte diablement redoutable qui consiste à vous attraper les jambes et ne plus vous lâcher jusqu'à ce que vous répondiez correctement à la question.

Mesdames vous savez maintenant ce qu'il vous reste à faire.

mercredi 6 juillet 2011

Quel type de père êtes-vous ?

Ce qu'il y a de déroutant avec les enfants, c'est la nécessité de savoir répondre au quart de tour aux questions les plus farfelues. Votre capacité d'improvisation est mise à rude épreuve à longueur de journée et la moindre faute, le moindre écart peut vous être fatal.
Je ne résiste pas à l'envie de partager ce savoureux - et non moins véridique - dialogue avec mon aîné, qui me dit, en me montrant du doigt sa tranche de poulet sous cellophane :   
- Papa ça pousse où ça ? 
- Mais c'est du poulet ça ma chérie 
- C'est un morceau de la poule ?
- Oui ma chérie c'est un morceau du poulet
- Mais papa il est où le bec ? 
Que répondre à cette question désarmante ? Je dois reconnaître avoir été muet quelques secondes et avoir imaginé en un éclair les différentes réponses que je pouvais lui faire :
Le papa carnivore
- Je l'ai déjà mangé ma chérie le bec. Je suis désolé, si j'avais su que tu le voulais, je te l'aurais mis de côté.  
Le papa factuel
- Le bec a été coupé dans l'abattoir. Nous n'avons conservé que les parties comestibles du poulet. A l'heure qu'il est, le bec est probablement incinéré avec le reste de la carcasse.
Le papa menteur
- Laisse moi bien regarder. Là, tu vois le petit bout blanc, sur ta tranche, et bien c'est le bec. Oui c'est ça, c'est un tout petit poulet qui avait un tout petit bec.  
Le papa politicien
- Ma chérie la très grande majorité des becs ne se mangent pas et il est de notoriété publique que les poulets ne s'en séparent que très rarement.  
Le papa accrobate
- Tu veux dire le .... le bac ! Le bac dans lequel on fait manger les poulets. Et bien il est resté dans le poulailler.
Le papa végétarien
- Ma chérie les becs ne se mangent pas. Tout comme d'ailleurs le reste du poulet. Tu peux me donner ta tranche tu sais, tu n'es pas obligé de la manger. Je comprendrais parfaitement que tu puisses faire un blocage. 
Le papa pressé
- Ma chérie mange ton poulet
Le papa macho
T'es bien la fille de ta mère toi. Deux vrais poules, vous n'arrêtez pas de jacasser.
Le papa pratique
C'est un poulet sans bec, sans pattes et sans plumes. Il est tout plat comme ça il se range plus facilement dans le frigo.
Et vous quel type de papa êtes-vous ?

mardi 5 juillet 2011

Papa coach sportif

Je suis actuellement à la tête d'une écurie de deux athlètes très prometteurs. Vous l'aurez compris, je suis coach sportif. Un métier très éprouvant et exigeant mais aussi passionnant et qui nécessite des compétences pointues dans de nombreux domaines.

Tout d'abord en nutrition / diététique. Vous devez veiller à la bonne alimentation de vos athlètes. Une alimentation équilibrée est une des conditions essentielles de la performance. Suffisamment de protéines et de glucides lents et pas trop de lipides et de glucides rapides. Je prépare ainsi la totalité des repas, que j'essaie de faire les plus variés possibles.  

En physiologie et récupération. Je veille à l'ensemble du matériel utilisé, en particulier les chaussures qui portent tout le poids du corps. Elles doivent être à la fois légères et souples et en même temps assurer un parfait maintien. Le placement du corps lors des exercices physiques est déterminant pour éviter les blessures. Je suis sans cesse à conseiller mes athlètes: fléchis les jambes, tiens mieux le guidon, ne te penche pas trop, pousse sur les pieds pour avancer, ne cours pas en regardant derrière, mets tes mains lorsque tu tombes, garde le corps bien droit sur le poney, ... . Grâce à cette vigilance de tous les instants  je déplore finalement assez peu de blessures. La sieste est un moment important pour permettre au corps de se ressourcer, le moment clé de la journée pour la récupération. Comme tous les athlètes, les miens essaient régulièrement d'y échapper et je dois sans cesse être derrière eux. 

Je m'occupe bien sûr de tous les entraînements pour lesquels j'impose une discipline militaire. Lever à 8h permettant l'entraînement du matin après un petit déjeuner copieux. La clé de la performance se trouve dans la répétition des gestes sportifs jusqu'à ce que le cerveau n'ait plus à intervenir. Le geste devient alors mécanique et naturel. J'utilise pour cela la technique de reprogrammation neuro-motrice permettant un apprentissage optimal du geste. Le déplacement du poignet pour tracer un trait, le cheminement de la main pour enfiler une perle, le mouvement du bras pour retirer un vêtement. Autant de gestes qui sont inlassablement répétés et répétés et répétés sous ma direction autoritaire. Enfin je m'occupe de toute la logistique des entraînements (biberons, vêtements de rechange, collation, terrains d'entraînement). Il est en effet important que mes athlètes ne se soucient de rien et ne puissent penser qu'à la performance.

J'organise régulièrement des compétitions pour maintenir leur esprit de combattant en éveil : le 100m en poussette, le 3000m en slip, le lancer de petits pois, le saut du lit. J'essaie de trouver et de renouveller la concurrence dans les bacs à sable environnant.

Le coach sportif doit être également fin psychologue. Les crises de confiance sont fréquentes et il faut savoir y faire face. C'est dans la gestion de ces moments là que l'on façonne un moral de champion. Ma petite botte secrète c'est la sophrologie ou la visualisation positive que je pratique avec assiduité : ce sooooir vous allez vous endormiiiiiiiiir et faaaaaaire une nuuuuuuuit complèeeeeete ... vous allez joueeeeeer dans votre chaaaaaambre seuls et ne pas vous disputeeeeeer.

En septembre mon ainé participera aux Jeux de la Maternelle. Une gigantesque compétition regroupant une trentaine d'athlètes sous la direction d'un seul arbitre. Je vais enfin pouvoir mesurer grandeur nature ses progrès. J'ai hâte ;)        

lundi 4 juillet 2011

La fin de l'improvisation

J'évoquais précédemment la quête de sérénité comme un leitmotiv obsédant. Je découvre rapidement qu'avec des enfants, l'improvisation est son pire ennemi. Je vous propose une petite variation sur le thème du réveil. Un avant / après montrant les méfaits de l'improvisation lorsqu'on est en congé parental, ou plus généralement lorsqu'on a des enfants. Et vous, comment est votre réveil ?

Avant le congé parental (calme et sérénité)
Le réveil sonne. J'ouvre les yeux. Mes sens ne fonctionnent qu'à moitié, un voile recouvre ma vision. Je ne distingue que des ombres et des formes. Le réveil indique 7h peut-être 7h30. Mes muscles sont tous endoloris. A demi-éveillés pour les uns et endormis pour les autres. J'effectue inconscient la distance qui me sépare de la salle de bain. Les prochains instants sont dédiés à un protocole que j'effectue machinalement tous les matins après être sorti péniblement de mon lit. Je ne sais plus bien depuis le temps s'il a vocation à me préparer ou à me réveiller définitivement. Mes mouvements sont ritualisés à l'extrême, comme un ballet qui aurait été répété des centaines de fois sous les yeux exigeants d'un chorégraphe corrigeant la moindre erreur de placement. Mes pieds se posent aux mêmes endroits, mes mains accomplissement les mêmes mouvements. Comme chaque matin j'ouvre le robinet de la main gauche et je manque de me brûler. Maudit soit ce monde pensé pour et par des droitiers. Comme chaque matin je réalise qu'un peu de méthode la veille m'aurait épargné bien des désagréments. Et pourtant je sais que rien ne changera. Il est troublant de réaliser qu'avec le temps votre inconscient, pour un pourcentage important des actes de la vie quotidienne, prend le dessus sur votre conscient et vous dicte sa volonté. Un deuxième moi, pensais-je, un maître insondable dont le dessein ne peut-être mauvais. En cette heure matinale il m'aura porté, habillé, préparé et conduit à la cuisine. Comme tous les matins le bruit sourd et monocorde de la machine à expresso fait jaillir en moi des ondes de plaisir. Mon cerveau a depuis longtemps associé ce bruit à sa dose matinale de caféine. Je ne pense qu'à profiter de cet instant. Chaque gorgée avalée lentement réveille une partie distincte de mon corps, la douce sensation de chaleur remontant jusqu'au sommet de mon crane. Me voilà suffisamment conscient pour ouvrir la porte de la chambre de mes enfants. Endormis et apaisés ils me transmettent une énergie qui me suivra tout au long de la journée.

Après le congé parental (agitation et affolement)   
Des cris résonnent dans l'appartement. Je tourne la tête. 8h30 peut-être 8h45. Péniblement j'entre-ouvre la porte de la chambre de mes enfants. Les pleurs s'arrêtent. Mon aîné m'apostrophe "Papa j'ai faim - Je veux mon biberon - Est-ce que c'est l'heure de se réveiller ?". Le petit l'accompagne "Lééééé, Lééééé, Lééééé". A peine ai-je refermé la porte que les pleurs reprennent instantanément. Je n'ai pas la force de leur dire de se taire. Je concentre le peu d'énergie que j'ai, à cette heure matinale, vers une seule et unique tâche : la préparation des biberons qui devrait m'apporter un peu de sérénité. J'ouvre le placard et je récupère les biberons en kit. J'en assemble deux, avec beaucoup de difficultés, sans aucune considération pour l'assortiment des couleurs. Haut de biberon. Bas de biberon. Tétine. Haut de biberon. Bas de biberon. Tétine. Les pleurs, qui augmentent crescendo, agissent comme un aiguillon qui me rappelle à l'ordre chaque fois qu'un geste est superflu ou inefficace. Je ne réagis qu'aux stimuli extérieurs, mon inconscient est lui encore endormi. Lorsque mon regard croise par hasard mon graal, la machine à café, je le détourne immédiatement pour ne pas perdre de vue mon objectif. Mes besoins peuvent bien attendre. Pas les leurs. Je verse le lait. 240ml. 2 fois.  Et je me précipite dans la chambre. J'attrape le plus petit auquel je retire sa turbulette. De douces effluves remontent de son "body", la nuit semble avoir été productive. Je n'ai évidemment pas la force de le changer et me convaincs que cela peut bien attendre. Quelques minutes de plus ne devrait rien changer. Il semble s'en accommoder. Moi aussi. J'intime l'ordre au plus grand de me suivre. Les pleurs reprennent. "Dans les bras - Dans les bras papa". Je me rapproche du lit du plus grand. Je repose par terre le plus petit et je tends les bras vers le grand. Il s'arrête instantanément de pleurer tandis que le petit prend immédiatement le relais. Il est amusant de constater qu'ils ne pleurent quasiment jamais ensemble. Merci ! Cela prolonge notre plaisir. Je capitule. Je laisse le grand dans son lit. Je repose le petit dans le sien. Il se tord dans tous les sens en pleurs. Le grand le regarde, perplexe, en silence. Je retourne à la cuisine et reviens les bras chargés des deux biberons. Les mains se tendent vers moi comme dans une imploration divine. Les prochaines minutes seront des minutes de silence le temps pour moi de prendre, à toute vitesse, mon café. La journée ne fait que commencer et ils m'ont déjà absorbé une bonne partie de mon énergie. C'est promis, demain je mets le réveil à 7h30 et je prépare tout avant !

samedi 2 juillet 2011

Chaque jour le ciel est différent

Enfer de Dante ou Mythe de l'Arcadie ? Vous l'aurez compris à la lecture des derniers billets de mon blog, le congé parental est un peu des deux à la fois. C'est probablement ce qui lui confère son charme. Chaque jour le ciel est différent, c'est résumer la glorieuse incertitude de la vie en congé parental.

La curiosité est un de mes traits de caractère. Je fuis les vies réglées comme du papier à musique et je me jette avec délectation dans ce qui exalte un parfum de nouveauté. Me retrouver piégé par des accords convenus et imposés était l'une de mes angoisses avant de commencer mon congé parental. Devoir suivre une mélodie sans pouvoir écrire sa propre partition. Le dogme du sacro-saint rituel m'effrayait. Présenté par les plus grands pédopsychiatres, comme un impératif absolu pour trouver paix et sérénité avec vos enfants, je craignais qu'il ne soit comme une immense source d'ennui. Un éternel recommencement qui rendrait vos journées uniformes et sans saveur. Je voulais la paix et la folie. La sérénité et la sérendipité. Tout à la fois. Etais-je trop exigeant ?

Mes premiers mois d'homme au foyer ont balayé mes inquiétudes. Effectivement, chaque jour le ciel est différent !

Certes, comme pour chaque métier vous avez un certain nombre de passages obligés. Des repères du quotidien. Vos phares. Comme le soleil reste un phare dans un ciel changeant. Les couches. Les repas à préparer. Les machines à lancer. Autant de repères qui balisent inlassablement vos journées et qui peuvent être pour certain la caricature du congé parental. Mais ce qui est important est ce qu'il y a entre ces repères. Je me suis alors amusé à me remémorer les rituels professionnels auxquels j'ai été longtemps astreint. Et bien ils sont au moins aussi nombreux : les trajets pour se rendre au bureau, les pauses à la machine à café, les documents administratifs à remplir (note de frais, ...), la vérification compulsive de vos emails, les déjeuners au restaurant d'entreprise, les réponses stéréotypées aux clients sans compter les rituels propres à votre métier. Interrogez-vous et vous verrez que finalement, aussi épanouie que soit votre vie professionnelle, elle s'étire, elle aussi, entre des rituels qui se répètent inlassablement. Ils procèdent de la même logique que ceux que l'on met en place pour nos enfants. Ils nous transmettent stabilité et force pour affronter les situations nouvelles.

Le congé parental paradoxalement aura eu deux mérites essentiels à mes yeux. D'abord il aura cassé tous mes repères professionnels pour me construire un nouvel univers porteurs de ses propres codes et valeurs. Ce changement agit comme une énorme bouffée d'oxygène et induit une énergie nouvelle, différente. Ensuite je découvre que les enfants, contrairement à la majorité d'entre nous, sont en rébellion permanente contre l'ordre établi. La où, dans le monde professionnel, vous vous laissez porter par les rituels; dans le monde de l'enfance vous devez lutter pour garder un semblant d'ordre. Une lutte de tous les instants. Il est bien connu que les systèmes évoluent naturellement vers leur maximum d'entropie - c'est à dire vers le désordre et le chaos - et bien cette vérité n'a jamais été aussi vraie qu'avec de très jeunes enfants. Cela a deux conséquences. La première est que le rituel est réduit à sa portion congrue si vous n'y prenez pas garde et la deuxième est que chaque instant passé avec eux est unique. Je vous l'ai dit chaque jour le ciel est différent.

J'ai l'habitude de fréquenter la ménagerie du jardin des plantes. "OK ! Une visite au zoo quoi !" me diriez-vous. Et bien oui mais elle a toujours été différente. Elle s'est révélée être une expérience anthropologique animale lorsque nous avons passé plus d'une demi-heure devant la cage de la famille Orang-outang, mes enfants fascinés par leurs ressemblances comportementales avec les hommes. Elle s'est révélée être scène de comédie de boulevard lorsque dans le vivarium aux reptiles, alors qu'il pleuvait des cordes dehors, mon ainé se tortille dans tous les sens. Je dégaine immédiatement le pot que je conserve sous la poussette et je l'installe dans un coin sous les serpents devant les yeux médusés des touristes parisiens. Quand soudain j'entends derrière moi :"Monsieur, votre enfant est en train de boire l'eau des poissons !". Effectivement mon plus jeune était en train de boire l'eau verdâtre et probablement saumâtre d'une fontaine à poisson dans l'entrée du vivarium. Vision effroyable. je l'imaginais déjà avec un poisson frétillant entre les dents. Mon cri a résonné dans tout le vivarium et a dû réveiller tous les reptiles endormis. Elle s'est révélée être une expérience socialement exquise lorsque j'ai rencontré un papa indien, en tourisme dans la capital, et dont nos enfants respectifs se sont mis à jouer ensemble comme s'ils s'étaient toujours connus. 

Entre anecdotes savoureuses, observations pointues et liens sociaux agréables, chaque sortie est une aventure plus proche des tribulations de l'Odyssey que du siège de l'Iliade. Ma vie d'aujourd'hui est peuplée de petites anecdotes et de petites rencontres qui lui donne son sel, son piquant et son charme. Alors oui, l'horizon n'est pas très large, je ne discuterai jamais, ou pas avant un certain temps, de l'affaire DSK, de la crise du nucléaire ou de philosophie avec mes enfants mais ils me procurent bien d'autres plaisirs et joies dans une vie qui, contrairement à ce que je pouvais craindre, est très très loin d'être un éternel recommencement.    
   

jeudi 30 juin 2011

Ces petits riens qui font tout le congé parental !

On m’a longtemps caché les désagréments que j’endurerai à l’occasion de mon congé parental. J’évoquais dans un billet précédent une renaissance, je dois reconnaître qu’à certains égards, certaines transformations ressemblent bien plus à l’ingratitude de la puberté à l’adolescence. Pour tous les hommes qui désirent devenir papa mais qui n’ont pas encore franchi le pas je vous invite à arrêter ici votre lecture. Il se peut en effet que les mots qui suivent vous retirent à tout jamais l’envie de rejoindre le cercle très ouvert des parias .. euh pardon … des parents.

N’imaginez pas, comme j’ai pu l’imaginer, que le congé parental sera pour vous l’occasion de porter à longueur de journée les vêtements « casual chic » dont vous avez toujours rêvé. En faisant le choix du congé parental vous devrez troquer vos costumes impeccable et vos chemises immaculées contre des vêtements qui porteront très rapidement les stigmates de votre nouveau métier, leurs couleurs changeant dans la journée au grès des repas. Impossible de rester propre lorsqu’on a des enfants, à moins d’accepter la solution qui consiste à changer quatre ou cinq fois de tenus par jour. Voici quelques exemples. Les repas évidemment sont un moment critique. Au-delà des projections de nourriture, somme toute assez banales et qu’un bon entraînement vous permet d’éviter assez facilement, les câlins post-dessert sont redoutables. Quelques minutes d’inattention et la symbiose alimentaire avec vos enfants sera totale. De mon côté rien n’y fait, c’est toujours après un bon repas que mes enfants ont envie de se serrer contre moi. Les sorties au parc sont tout aussi terribles. Une seconde d’égarement et vous voilà avec le petit dernier dans les bras, ses petits pieds menus et boueux s’essuyant sur votre tout nouveau T-Shirt Abercrombrie & Fitch. Je ne compte plus le nombre de fois où cela m’est arrivé. Pourquoi personne ne s’est penché sur cette question fondamentale ?

Préparez-vous également, à l’occasion de votre congé parental, à découvrir le retard systématique. Vous mettiez un point d’honneur à arriver à l’heure à vos réunions et bien sachez qu’avec deux enfants en bas âge votre seule solution pour continuer à respecter les horaires sera d’indiquer des fourchettes. Je me suis surpris à dire à mon banquier : « je serai là entre 16h et 16h30 » « Euh vous voulez dire 16h ?». Les structures collectives de la très petite enfance ont très bien compris cette difficulté : les plages d’accueil sont extrêmement larges. Je peux déposer mon aîné entre 14h et 15h30 pour ses après-midi de crèche et je dois avouer utiliser la totalité de l’amplitude en fonction des circonstances. Je comprends également désormais pourquoi on nous impose d’arriver à 18h45 pour une fermeture de la crèche à 19h. Non seulement vous n’êtes jamais à l’abri d’un imprévu mais en plus tout prend tellement de temps avec de très jeunes enfants. Il est plaisant en revanche de noter qu’on s’y habitue assez vite. La vie toute entière s’organise autour de cette nouvelle réalité. Vous remarquerez ainsi que très souvent les couples avec jeunes enfants ne donnent pas d’indications d’heure pour les dîners qu’ils organisent. « Venez quand vous pouvez !». C’est la quintessence de la déformation professionnelle.

Vous qui aimez la haute gastronomie sachez qu’en congé parental une bonne partie de vos repas sera constituée des restes de celui de vos enfants. Vous allez régulièrement finir leurs plats et leurs desserts. Cela vous permettra non seulement de gagner du temps sur votre propre repas mais également d’éviter de jeter trop de nourriture car il est très difficile d’anticiper ce qui sera mangé par vos enfants. Le jour où, comme moi, vous réaliserez que vous finissez régulièrement leurs infâmes petits pots vous saurez  que vous aurez enfin gagné vos gallons de mère au foyer.

Sachez également que votre voix va muer. Vous allez monter beaucoup plus haut dans les aigus dans la vie de tous les jours et beaucoup plus bas dans les graves en période de stress, le juste milieu disparaissant corps et bien. Un véritable soprano. Mais cela n’est rien à côté du phénomène de mithridatisation qui vous rendra insensible peu à peu aux pleurs et aux cris. Ce pourrait être une faculté intéressante si cela n’avait pour cause possible une perte réelle d’audition.

La vie de père en congé parental n’est pas toujours des plus plaisantes ... et ça on s’était bien gardé de m’en parler !

lundi 27 juin 2011

Le père n'est décidemment pas une mère comme les autres

Aujourd'hui j'étais tranquillement attablé avec mes enfants pour le petit-déjeuner lorsque ma femme, qui se préparait pour le travail, fait irruption dans la cuisine. Il s'ensuit le dialogue suivant avec l'un de mes enfants.


- Papa pourquoi maman est toute verte !
- Et bien ma chérie il s'agit d'un masque à base de concombre
- (du fin fond de la salle de bain) mais non il s'agit d'argile, un masque à base d'argile !
- Papa c'est quoi l'argile
- Et bien l'argile c'est ... euh ... c'est de la terre !
- Mais si c'est de la terre pourquoi c'est vert ?
- Et bien c'est une terre qui a été colorée
- Mais pourquoi elle a été coloriée la terre
- Pour lui ajouter des propriétés anti-ride. Tu sais ma chérie à partir d'un certain âge les femmes ont des rides sur le visage qu'elles essaient de masquer.
- (du fin fond de la salle de bain) mais ce n'est pas pour les rides, je n'ai pas de rides ! C'est pour le sérum.   
- Papa c'est quoi le sérum
- Et bien c'est une bonne question. Le sérum c'est ... euh ...
- (du fin fond de la salle de bain) mais non pas le sérum ... le sébum
- Oui, bien sur, le sébum ! C'est un produit qui est généré par la peau quand on vieilli et qui n'est pas bon.
- (du fin fond de la salle de bain) mais non c'est une substance biologique sécrétée à l'adolescence
- Papa pourquoi ...
- Euh ma chérie là je suis perdu. Tu demanderas à ta mère ce soir quand elle rentrera

Le père n'est décidemment pas une mère comme les autres !

dimanche 26 juin 2011

Le culte de l'inutile - chapitre 2

Il est fascinant de se dire que la majeure partie de l'humanité a été parent et que malgré cela chacun continue de son côté à commettre les mêmes erreurs et à entasser inexorablement les objets inutiles ou peu utiles. Comment, lorsqu'on a connu la rigueur implacable des sciences les plus nobles, ne pas être ébranlé par ce constat ? Pourquoi n'avons-nous jamais été correctement conseillés ? Nous avons pourtant autour de nous de nombreux jeunes parents ainsi que de plus anciens. Je vois aujourd'hui au moins quatre raisons qui expliquent ce culte de l'inutile ou du peu utile.

Tout d'abord l'inutile est relatif. Je découvre assez vite que l'éducation et le développement d'un enfant n'a rien d'une science exacte. Il y a finalement assez peu de faits établies ou plutôt il y en a autant que de bébés. Ce qui peut fonctionner pour l'un peut ne pas fonctionner pour l'autre. Vous êtes ainsi condamnés en tant que parent à un empirisme désuet qui pourra vous pousser à essayer les recettes même les plus absurdes : si je lui mets un CD de bébés qui dorment est-ce qu'il va faire ses nuits ?

Ensuite l'inutile rassure. La vérité d'hier est rarement celle de demain et celle d'aujourd'hui est par conséquent impénétrable. Dans ce contexte la solitude du parent devant ses responsabilités peut être particulièrement pesante. On est dès lors beaucoup plus réceptif aux discours des "spécialistes", surtout lorsque les "buzz word" sécurité, prévention, risques sont utilisés.

L'inutile aide. Surtout au début. La difficulté des premiers mois, en particulier le manque de sommeil, vous fait décupler la valeur d'aide que peut apporter un objet. L'investissement n'est rien en regard de l'augmentation, même modique, de votre confort de vie. Après quelques nuits blanches j'aurais été prêt à acheter du lait de kangourou si on m'avait dit que cela lui permettrait de dormir ne serait-ce que 4 heures de suite. Je constate ainsi, à posteriori, que la majeure partie de nos achats inutiles ou peu utiles a été réalisée dans les 6 premiers mois.

Enfin, et c'est surtout vrai pour les papas, l'inutile distrait. Faire les magasins est finalement une bonne manière de s'occuper de ses enfants sans avoir à gérer les couches, les pleurs et les repas. On en apprécierait presque les sorties au BHV les samedis en période d'affluence maximum.

Voilà pourquoi nous avons, comme beaucoup de parents, joints l'inutile à l'accessoire. Mais de cette expérience je retire néanmoins quelques leçons que je vous livre avec plaisir :  
  • N'achetez un objet que lorsqu'il vous est conseillé par une famille d'au moins 3 enfants qui vous promet l'avoir utilisé pour le petit dernier.
  • Assurez-vous d'avoir dormi au moins 8h d'affilée avant d'effectuer le moindre achat
  • Fuyez les objets dont le "packaging" contient les mots "miracle" ou "miraculeux". En matière de bébés les miracles n'existent pas.

samedi 25 juin 2011

Le culte de l'inutile - chapitre 1

J'aurais préféré un bébé sans les options. C'est proprement prodigieux la quantité d'équipements qui peut accompagner la vie d'un jeune enfant. L'abîme d'interrogation des nouveaux parents semble ne pouvoir être comblé que par un amoncellement d'objets aux prétendues vertus miraculeuses. En tant qu'homme je m'étais promis d'opposer une farouche résistance, telle l'ultime résistance de Custer, à ce déferlement d'objets pour bébés tellement symptomatique et caricatural de notre société de consommation. Mais comme Custer qui céda durant la bataille de "Little Big Horn" j'ai un peu le sentiment d'avoir perdu ma petite guerre contre le culte de l'inutile, non sans avoir mené héroïquement quelques batailles mémorables.

J'avais pourtant une qualité avant - parmi bien d'autres bien sûr ;) - cette faculté à identifier l'essentiel de l'accessoire. Mais voilà, le monde du bébé n'est pas celui de l'entreprise et dans mon nouveau métier de père je dois bien admettre que l'accessoire a eu raison de moi. Il n'y a aujourd'hui pas un centimètre cube de mon appartement qui ne trahirait pas la présence d'un bébé. Où que vous puissiez poser les yeux, un objet vous rappellera que ce toit abrite de très jeunes enfants. Nos placards regorgent d'objets remisés certains remerciés d'autres vilipendés mais tous acheté avec une conviction profonde celle d'adoucir notre quotidien de parents ou d'améliorer celui de nos enfants.

Voici pour vous mon Top 5 des produits inutiles ou très peu utiles. Je suis d'ailleurs prêt à payer pour que vous me débarrassiez de certains d'entre eux, notamment le premier !
   
Numéro 1 : Le landau
Magnifique landau aux couleurs chatoyantes nous permettant de le repérer plus aisément sur les parkings à landaus. En fait une fin de série, achetée sur Internet à 25% de son prix initial, que nous avons soupçonné assez vite être plutôt un début de série qui n'aurait jamais trouvé preneur. Nous avions quelques doutes déjà à l'époque qui avait été levé par une étude très sérieuse qui évoquait la sécheresse affective du nourrisson en poussette lorsque ce dernier est face au trottoir et qu'il ne peut voir ses parents. Ce landau permettait, pour un prix modique, non seulement au nourrisson de ne pas quitter ses parents des yeux mais aussi aux parents de ne pas perdre de vue leur landau particulièrement bigarré. Par ailleurs son aspect massif était la garantie d'un confort absolu pour notre nourrisson. Je dois reconnaître avoir été à l'origine de cet achat. J'ai tenu trois semaines jusqu'à ce déjeuner à Paris au cours duquel ma belle-mère se propose gentiment de faire quelques tours avec la poussette pour endormir notre enfant avant de revenir une poignée de minutes plus tard en se plaignant du dos. Effectivement l'absence de mobilité des roues, qui lui garantit une assise exemplaire, rend notre char d'assaut assez peu maniable. J'ai suspecté ce jour là une coalition mère-fille pour me faire céder, ce qui n'a pas manqué de réussir. Nous avons rapidement acheté une nouvelle poussette, achat qui a ensuite été complété à la naissance de notre deuxième enfant par une poussette double. Avec le recul aurions-nous pu être plus efficace ? Oui évidemment ! La poussette double aurait largement pu suffire.

Numéro 2 : le mouche bébé électrique 
Il n'aura lui tenu qu'une journée. Les promesses d'efficacité n'ont jamais été suivies d'effets. Après un essai désastreux nous revenons à la bonne veille méthode de la pipette et de l'aspiration manuelle, certes un peu barbare mais terriblement efficace.

Numéro 3 : la couverture magique
En fait une véritable camisole de force adaptée à l'enfant et censée améliorer l'endormissement. Je n'ai jamais réussi à m'y faire !

Numéro 4 : le transat de bain
Notre bébé devenant trop grand pour la petite baignoire en plastique nous décidons d'opter pour un transat de bain positionnée dans notre baignoire. 2 inconvénients majeurs lui ont valu sa sentence. D'abord pour que votre enfant, bien calé dans son transat, soit dans l'eau, le principe du bain, il vous faut remplir la baignoire quasiment à ras bord. Pour une petite crevette de seulement quelques kilos c'est proprement aberrant. Ensuite notre enfant n'a jamais réussi à tenir dans le transat.

Numéro 5 : l'ombrelle à bébé
Une jolie ombrelle à ajouter à votre poussette. Je n'ai jamais réussi à la faire tenir en place !

Il est fascinant de se dire que la majeure partie de l'humanité a été parent et que malgré cela chacun continue de son côté à commettre les mêmes erreurs. Comment, lorsqu'on a connu la rigueur implacable des sciences les plus nobles, ne pas être ébranlé par ce constat. Je vous propose demain une tentative d'explication ainsi que mon top 5 des objets qui ont changés ma vie de papa (il y en a quand même !).

jeudi 23 juin 2011

L'exotisme se cache au coin de la rue

Il est particulièrement difficile d'évoquer son quotidien et le plaisir qu'on peut prendre à passer du temps avec ses enfants. Je le comprends d'autant mieux que je faisais partie de cette catégorie d'homme, très certainement l'écrasante majorité, qui considérait qu'un enfant n'avait d'intérêt que passé 3-4 ans lorsqu'il commence réellement à être interactif. La vie d’un nourrisson m’a toujours paru bien fade et insipide. Je n’imaginais pas pouvoir m’attacher et encore moins prendre du plaisir avec un petit d'homme à l’état de chrysalide. Mais par quel miracle ai-je pu alors me retrouver en congé parental ? Je dois cette décision pour le moins iconoclaste à mon épouse. Non pas que nous soyons un couple résolument moderne où ma femme décide de tout pour nous. Non mais à travers son exemple et son épanouissement formidable durant son propre congé parental qui a précédé le mien elle a su me communiquer une envie irrépressible de vivre à mon tour cette expérience. Après tout pourquoi n'y aurait-il que les femmes qui auraient le droit d'en profiter. 

Cette envie en revanche je ne pouvais y mettre des mots. Aujourd'hui après quelques mois il m'est plus aisé d'essayer d'expliquer, au delà du simple plaisir de voir grandir ses enfants, ce bonheur ultime qu'est le mien actuellement. Je vais essayer de le résumer pour vous aujourd'hui en 2 mots (perception et imagination), 2 aphorismes et 2 paragraphes. Conscient que chaque expérience de la paternité est unique je vous laisse évidemment réagir et commenter ma propre expérience.
L'exotisme se cache au coin de la rue.
Les enfants vous obligent à savoir reconnaître et 3 apprécier des évolutions, des accomplissements ou des situations imperceptibles de prime abord. La parentalité s'accompagne d 'un développement vertigineux de vos capacités perceptives. Votre regard sur le monde change considérablement. L'environnement qui vous entoure se transforme en un immense terrain de jeu et de découverte. Chaque recoin est exploré du regard pour en apprécier l'attrait éventuel ainsi que le risque associé. Vous redécouvrez des lieux que vous aviez cent fois arpenté mais sans jamais prendre le temps de les apprécier. Le moindre bruit, la moindre odeur devient une nouvelle expérience à partager avec vos enfants. Vous voyez le monde à travers leurs yeux et vous arrivez à vous émerveiller, comme eux, pour des détails qui paraissaient insignifiants il y a peu. C'est une redécouverte de tous les instants on pourrait presque dire une renaissance. La majestuosité d’un arbre, la finesse du sifflement d'un oiseau, l’ivresse du parfum des roses autant de plaisirs qui se révèlent à celui qui veut bien prendre le temps de regarder, d'écouter et de sentir. Le plaisir est par ailleurs décuplé ces instants étant vécus plusieurs fois. Une première fois pour vous, une deuxième fois dans leur regard comblé de bonheur et de nombreuses fois ensuite lorsque vous évoquez à nouveau tous ces moments insignifiants mais tellement fabuleux.

L'aventure est assoupie au plus profond de votre imagination.
Cette perception peut être sublimée par le pouvoir de votre imagination qui crée, avec les enfants, une réalité parallèle exaltante. Nul besoin des jeux les plus sophistiqués, des tenus les plus raffinées, des endroits les plus recherchés ou des situations les plus théâtrales. Votre imagination devient votre chapiteau qui abritera alors les histoires les plus passionnantes. Je dois avouer avoir pris énormément de plaisir à jouer de mon imagination et de ma créativité, trop endormies depuis de trop longues années, pour inventer des situations pour mes enfants. Je me souviens par exemple de ces instants magiques passés en voiture une main par dessus l'épaule dépassant du siège et se transformant tour à tour en escargot, crocodile, poisson, crabe et girafe. Quelques doigts respectivement en forme d'antenne, de gueule, de pinces, de corps effilé ou de cou. Un plébiscite. Nos nouveaux passagers sont même réclamés lorsque je suis seul au volant mais j'ai promis à mon épouse de les dresser pour qu'ils ne sortent que lorsque nous sommes deux et que c'est elle qui conduit.

Il y a bien sur bien d'autres sources de plaisir et de bonheur avec les enfants que j'aurais l'occasion de développer ultérieurement.

mardi 21 juin 2011

Un si délicieux quotidien

Je découvre très rapidement, au début de mon congé parental, qu'à chaque stade du développement de l’enfant est associé un concept de pédopsychiatrie. J’imagine le profond soulagement de tous ces parents qui, grâce à ces théories, arrivent à donner du sens aux comportements « à priori » absurdes de leurs enfants. Je ne tarde pas à bénéficier à mon tour de ces effets de soulagement.

Lorsque je débute mon congé parental, mes deux enfants sont à un stade de développement tout à fait délicieux.

Le premier, qui a 2 ans, est dans sa période du non. Une phase d'opposition dont j'avais entendu parler mais qui dépasse de loin tout ce que j'avais pu imaginer. Il est assez troublant, lorsque vous vous êtes fait une joie de passer du temps avec votre enfant, qu'il vous fasse comprendre à longueur de journée que ce que vous lui proposez ne lui convient pas. Fort heureusement c'est une période relativement facile à gérer et qui, dans sa phase aiguë, ne dure pas trop longtemps.

Le deuxième, qui a 10 mois, est dans sa période « homme des cavernes ». Lorsqu’il souhaite quelque chose, ce qui signifie à peu près toutes les cinq minutes, il émet un son, tantôt strident, tantôt guttural, qui ressemble tout à fait à l’idée que je peux me faire des échanges vocaux des hommes des cavernes. Devant ma perplexité, mon épouse me précise très vite qu'une bonne manière d'éviter ces situations, est de tâcher de comprendre la nature des cris, qui ont tous une signification particulière. Mais je n'ai pas du tout envie d'apprendre le langage de l'homme des cavernes ! A ma régression je préfère infiniment sa progression et je n'ai bien sûr qu'un souhait, que le passage du cri au langage articulé se fasse le plus rapidement possible.

J’ai évidemment d’abord cru à une mauvaise blague de mon épouse. Une sorte de bizutage pour mon entrée dans le congé parental. Elle se sera mis d'accord avec mes enfants pour me jouer un vilain tour et éprouver dès les premières journées ma capacité de résistance. Mais non, je comprends à la lecture de quelques ouvrages fort savants, qu'il s’agit de stades de développement tout à fait normaux. Ouf me voilà rassuré.

Enfin pas complètement. Je réalise par déduction, que lorsqu'un enfant fait l'acquisition d'un concept nouveau il le pousse à son paroxysme pour bien l'intégrer. L'enfant découvre le "non" et cela devient un leitmotiv quotidien. L'enfant découvre le langage et il n'utilise plus que les sons les plus aiguës et les plus graves de son répertoire. Étrange que ce processus d'apprentissage et de développement qui se joue de la modération pour verser dans l'excessif voir l'extrémisme. Que me réservent les prochains stades de développement ? Je commence déjà à appréhender l'acquisition de la propreté. Un rapide calcul ... et oui ... je serai toujours en congé parental et ce sera à moi de le gérer ! 

lundi 20 juin 2011

La culture est-elle soluble dans le congé parental ?

Qui a dit que la culture n'était pas soluble dans le congé parental ? Non je ne parle pas de l'intégrale de Tchoupi ni des petits "Dokeo", très bien faits au demeurant, et à la lecture desquels il m'arrive d'apprendre des choses, je dois bien le reconnaître ! Non, je parle de la vraie culture bien sûr, celle qui a pour terrain de jeu le tout Paris et pour résidence principale le Louvre.
Me voilà donc décidé à profiter enfin des expositions temporaires et autres merveilles que la capitale a à nous offrir. Et je ne résiste pas à l'envie de vous raconter deux de mes aventures.
Fasciné depuis longtemps par la civilisation des Incas, je ne pouvais manquer pour rien au monde l'exposition "L'or des Incas" à la pinacothèque de Paris. Sagement je décide de ne pas tenter le diable et de m'y rendre simplement accompagné du plus jeune de mes enfants. On ne peut imaginer le sentiment de liberté lorsque l'on passe de deux enfants à un seul. La vie vous semble si légère et tellement de choses sont à nouveau possible. Le métro et le bus sont par exemple deux moyens de transport tout simplement proscrits lorsque vous avez deux enfants en bas âge. Ils redeviennent possibles avec un seul enfant. 
Dès mon entrée dans le musée, je suis saisi par l'ambiance de recueillement qui y règne. Une solennité envoûtante. Une tranquillité en ce jeudi après-midi qui ne sera troublée que par ... mon enfant !!! Je me souviens encore du regard accusateur de cette dame, qui semblait tout droit sorti de l'opéra ou du grand prix de l'Arc de Triomphe, et qui me dit sur un ton sarcastique : "vous avez raison il faut les initier très tôt". Je me souviens encore de ma recherche effrénée dans les vitrines de l'exposition d'un objet qui pourrait susciter l'intérêt d'un bébé d'un an. Après quelques bousculades et avoir un peu joué des coudes, j'ai finalement découvert quelques bibelots de la taille d'un dé à coudre qui avaient la forme d'animaux (oiseaux et singes). J'ai pu m'en approcher et gagner quelques minutes de tranquillité chèrement payée : "excusez-moi, c'est une urgence ! Laissez-moi la place devant les singes, votre tranquillité en dépend !". Je dois bien reconnaître ne pas avoir profité dignement de cette exposition, maudissant cette civilisation qui ne devait pas beaucoup aimer les enfants sinon ils auraient pensé aux générations futures et nous aurions eu quelques objets dignes d'intérêt pour un bébé. Il en va de même des organisateurs qui ont eu l'impolitesse de mettre les vitrines d'exposition en hauteur de telle sorte que les enfants ne peuvent admirer les trésors des Incas que confortablement installés dans les bras de leurs parents.        

Ma deuxième sortie, deux-trois semaines plus tard, était prévue pour le temple de la culture, le musée du Louvre. Je dépose mon plus grand enfant vers 15h à la crèche et me voilà dans le métro une nouvelle fois avec le plus jeune, toujours âgé d'un an. Deux changements de métro et un changement de bébé plus tard, sans compter les nombreuses marches qu'il a fallu grimper tout en portant la poussette (les escaliers mécaniques étant une denrée finalement rare dans le métro parisien), me voilà arrivé au Louvre vers 16h30. Juste à temps pour le goûter. Encore faut-il trouver le lieu adéquat. Je me mets alors à la recherche d'un café accueillant qui sera finalement Angelina. Vers 17h30 je peux enfin commencer la visite des antiquités égyptiennes tout en réalisant que, sur la base de mes temps de passage à l'aller, si je veux pouvoir récupérer mon aîné à la crèche avant 18h45 il va  me falloir partir ... maintenant ! Juste le temps d'admirer une sculpture et me voilà sur le trajet du retour qui s'avèrera tout aussi épique. A la difficulté de la transhumance en période de pointe il m'a fallu ajouter la frustration d'avoir raté mon après-midi. Heureusement que mon enfant a particulièrement apprécié le métro, une véritable oeuvre d'art pour les yeux d'un bébé.

Depuis ces deux épisodes, lorsque je planifie une sortie culturelle, non seulement je double systématiquement les temps de transport prévus mais en plus ... je m'abstiens d'y aller avec les enfants ! C'est à cette condition que la culture est soluble dans le congé parental. Et puisqu'on parle de culture j'en profite pour vous recommander l'exposition temporaire au Louvre sur Claude le Lorrain qui est absolument magnifique pour quiconque aime les paysages et la peinture.  

samedi 18 juin 2011

De la déculpabilisation du parent moderne

Comme Alfred de Musset l'a si joliment décrite j'imaginais la vie en congé parental comme une rose dont chaque pétale est une illusion et chaque épine une réalité. Une vie faites de choix cornéliens où la plus infime des erreurs est payée au prix le plus fort, où le moindre traumatisme du bébé se transforme inéluctablement en névrose de l'adulte. Avoir des enfants c'était pour moi accepter cette écrasante responsabilité.  

Une responsabilité à la fois oppressante car éternelle et sournoise car drapée de plaisir et de gaieté. Les moments de bonheur vous la rende douce et agréable mais ne vous y trompez pas elle n'en est pas moins redoutable. Son poids pourra vous écraser, comme la si légère neige qui fait ployer et céder sous son amoncellement les toits les plus robustes.

Mais lorsque cette responsabilité devient un fardeau trop lourd à porter, lorsque vous plier sous le joug de la culpabilité sachez qu'il y aura toujours une croyance populaire pour vous prêter main forte, un adage pour transformer votre prétendue épine en illusion. 

La déculpabilisation du parent moderne est en effet devenue une pratique en vogue. A chaque situation culpabilisante vous trouverez un précepte qui vous sera doctement asséné comme une vérité plusieurs fois millénaires et adoucira votre existence.
Vous avez quelques difficultés à partager un instant de complicité avec votre enfant. Ne vous inquiétez pas le jeu libre est absolument indispensable à son épanouissement et à son développement. Cela lui permettra de développer son imagination et de faire l'apprentissage à sa manière des objets qui l'entourent.

Vous avez quelques difficultés à lui garantir une hygiène irréprochable. Votre enfant à tendance à tout mettre en bouche et vous êtes démunis devant un tel comportement. Ne vous inquiétez pas il est simplement en train de se constituer ses défenses immunitaires.

Votre enfant à quelques difficultés à manger. Rassurez-vous, un enfant ne se laisse jamais mourir de faim. S'il ne mange pas c'est qu'il n'a plus faim.

Votre enfant ne fait plus de sieste. Et bien rassurez-vous là aussi en vous souvenant que l'important est le temps de repos et de calme et pas l'endormissement en tant que tel.

L'adage suprême est probablement celui affirmant que vos enfants sont uniques et que vous seuls, en tant que parents, êtes les plus à même de savoir comment réagir. Gageons qu'il sera rapidement élevé au rang de grande cause nationale.

Du coup, à ma grande surprise et pour mon plus grand plaisir, la vie en congé parental se révèle être une rose dont chaque épine est une illusion et dont il ne tient qu'à vous de savoir en apprécier la réalité des pétales.