lundi 4 juillet 2011

La fin de l'improvisation

J'évoquais précédemment la quête de sérénité comme un leitmotiv obsédant. Je découvre rapidement qu'avec des enfants, l'improvisation est son pire ennemi. Je vous propose une petite variation sur le thème du réveil. Un avant / après montrant les méfaits de l'improvisation lorsqu'on est en congé parental, ou plus généralement lorsqu'on a des enfants. Et vous, comment est votre réveil ?

Avant le congé parental (calme et sérénité)
Le réveil sonne. J'ouvre les yeux. Mes sens ne fonctionnent qu'à moitié, un voile recouvre ma vision. Je ne distingue que des ombres et des formes. Le réveil indique 7h peut-être 7h30. Mes muscles sont tous endoloris. A demi-éveillés pour les uns et endormis pour les autres. J'effectue inconscient la distance qui me sépare de la salle de bain. Les prochains instants sont dédiés à un protocole que j'effectue machinalement tous les matins après être sorti péniblement de mon lit. Je ne sais plus bien depuis le temps s'il a vocation à me préparer ou à me réveiller définitivement. Mes mouvements sont ritualisés à l'extrême, comme un ballet qui aurait été répété des centaines de fois sous les yeux exigeants d'un chorégraphe corrigeant la moindre erreur de placement. Mes pieds se posent aux mêmes endroits, mes mains accomplissement les mêmes mouvements. Comme chaque matin j'ouvre le robinet de la main gauche et je manque de me brûler. Maudit soit ce monde pensé pour et par des droitiers. Comme chaque matin je réalise qu'un peu de méthode la veille m'aurait épargné bien des désagréments. Et pourtant je sais que rien ne changera. Il est troublant de réaliser qu'avec le temps votre inconscient, pour un pourcentage important des actes de la vie quotidienne, prend le dessus sur votre conscient et vous dicte sa volonté. Un deuxième moi, pensais-je, un maître insondable dont le dessein ne peut-être mauvais. En cette heure matinale il m'aura porté, habillé, préparé et conduit à la cuisine. Comme tous les matins le bruit sourd et monocorde de la machine à expresso fait jaillir en moi des ondes de plaisir. Mon cerveau a depuis longtemps associé ce bruit à sa dose matinale de caféine. Je ne pense qu'à profiter de cet instant. Chaque gorgée avalée lentement réveille une partie distincte de mon corps, la douce sensation de chaleur remontant jusqu'au sommet de mon crane. Me voilà suffisamment conscient pour ouvrir la porte de la chambre de mes enfants. Endormis et apaisés ils me transmettent une énergie qui me suivra tout au long de la journée.

Après le congé parental (agitation et affolement)   
Des cris résonnent dans l'appartement. Je tourne la tête. 8h30 peut-être 8h45. Péniblement j'entre-ouvre la porte de la chambre de mes enfants. Les pleurs s'arrêtent. Mon aîné m'apostrophe "Papa j'ai faim - Je veux mon biberon - Est-ce que c'est l'heure de se réveiller ?". Le petit l'accompagne "Lééééé, Lééééé, Lééééé". A peine ai-je refermé la porte que les pleurs reprennent instantanément. Je n'ai pas la force de leur dire de se taire. Je concentre le peu d'énergie que j'ai, à cette heure matinale, vers une seule et unique tâche : la préparation des biberons qui devrait m'apporter un peu de sérénité. J'ouvre le placard et je récupère les biberons en kit. J'en assemble deux, avec beaucoup de difficultés, sans aucune considération pour l'assortiment des couleurs. Haut de biberon. Bas de biberon. Tétine. Haut de biberon. Bas de biberon. Tétine. Les pleurs, qui augmentent crescendo, agissent comme un aiguillon qui me rappelle à l'ordre chaque fois qu'un geste est superflu ou inefficace. Je ne réagis qu'aux stimuli extérieurs, mon inconscient est lui encore endormi. Lorsque mon regard croise par hasard mon graal, la machine à café, je le détourne immédiatement pour ne pas perdre de vue mon objectif. Mes besoins peuvent bien attendre. Pas les leurs. Je verse le lait. 240ml. 2 fois.  Et je me précipite dans la chambre. J'attrape le plus petit auquel je retire sa turbulette. De douces effluves remontent de son "body", la nuit semble avoir été productive. Je n'ai évidemment pas la force de le changer et me convaincs que cela peut bien attendre. Quelques minutes de plus ne devrait rien changer. Il semble s'en accommoder. Moi aussi. J'intime l'ordre au plus grand de me suivre. Les pleurs reprennent. "Dans les bras - Dans les bras papa". Je me rapproche du lit du plus grand. Je repose par terre le plus petit et je tends les bras vers le grand. Il s'arrête instantanément de pleurer tandis que le petit prend immédiatement le relais. Il est amusant de constater qu'ils ne pleurent quasiment jamais ensemble. Merci ! Cela prolonge notre plaisir. Je capitule. Je laisse le grand dans son lit. Je repose le petit dans le sien. Il se tord dans tous les sens en pleurs. Le grand le regarde, perplexe, en silence. Je retourne à la cuisine et reviens les bras chargés des deux biberons. Les mains se tendent vers moi comme dans une imploration divine. Les prochaines minutes seront des minutes de silence le temps pour moi de prendre, à toute vitesse, mon café. La journée ne fait que commencer et ils m'ont déjà absorbé une bonne partie de mon énergie. C'est promis, demain je mets le réveil à 7h30 et je prépare tout avant !

1 commentaire:

  1. Je me dis ça tous les matins, mais je n'y arrive toujours pas. Mais les années passant, les enfants ont grandi et développé leur instinct de survie ! Et le petit dernier a bien compris que l'étoile de mer endormie ne servait à rien avant son premier café, donc râle directement auprès de ses aînées ;)
    Je découvre votre blog avec délices, enfin la vision d'un homme, d'un père, d'un "au foyer".
    Je vais, si vous me le permettez, lire vos écrits encore longtemps.

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